Dans les décennies récentes la mondialisation et ses diverses composantes telles la suppression des frontières commerciales, la réorganisation des processus de production (flux tendus, délocalisations), la dématérialisation de nombreux échanges, la libéralisation des flux de capitaux, l’accroissement de la vitesse de diffusion des informations ou encore le développement du secteur financier, ont modifié les évolutions économiques de nombreux pays et rendu obsolètes ou peu efficaces nombre de politiques ou régulations utilisées auparavant.

Jusqu’aux années 1990 des cycles assez réguliers étaient observés dans les pays occidentaux parallèlement à des quasi-absences de cycles dans les pays à économie planifiée. La mondialisation a accru les liens entre les économies des divers pays tout en rendant moins étroites les relations entre les investisseurs et les entreprises recherchant des financements. Des phénomènes cycliques ont pu disparaître ou être exacerbés, les caractéristiques de tels cycles, notamment leur fréquence, être fortement modifiées du fait d’une accélération du temps. Les politiques et régulations ont du être rapidement réadaptées à ce nouvel environnement qu’il s’agisse de la régulation prudentielle, des normes comptables, des règles commerciales, de la fiscalité, ou de la politique monétaire avec pour but, au moins en théorie, d’assurer une certaine stabilité des économies, et notamment du système financier.

Cette adaptation a conduit à partir des années 1990 à des régulations ou politiques coordonnées au niveau mondial, qu’il s’agisse de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), des nouvelles normes comptables, des régulations financières du type Bâle 3 (transcrites dans la Directive Européenne sur les exigences de fonds propres ((CRD IV), CRD pour Capital Requirement Directive), ou de la lutte contre les paradis fiscaux.

La récente crise financière et économique a montré que ce nouvel environnement était encore mal compris et que certaines politiques ou régulations avaient pu être à la source de la crise et l’avoir amplifiée. Dans la “chasse au coupable” et dans les débats, souvent biaisés et peu argumentés qui ont suivi, ont été évoqués le rôle de la finance mathématique, celui des agences de notation, la politique économique des Etats-Unis, l’absence de régulation (les trous noirs de la finance, i.e. le shadow banking), la rapacité des banquiers, la procyclicité de certaines régulations financières…

Stéphane Auray et Christian Gouriéroux