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Machine Learning et Modèles IRB : Avantages, Risques et Préconisations

Opinions
& Débats

La crise financière mondiale de 2007-2008 – dite crise des subprimes – a notamment été déclenchée en raison de l’insolvabilité des ménages américains à rembourser leurs crédits hypothécaires. Ce risque de crédit, pourtant bien connu des banques, a été sous-évalué et s’est ensuite propagé à l’ensemble du secteur financier international avec la titrisation effrénée des portefeuilles de crédits immobiliers américains et sa transmission dans les bilans bancaires des autres zones géographiques, principalement en Europe.

Pour contrer cette crise, les régulateurs mondiaux ont adopté plusieurs mesures, en particulier l’augmentation des exigences en capital réglementaire (fonds propres) des banques. En clair, ces dernières ont l’obligation de détenir des coussins de liquidité supérieurs à la période pré-crise. C’est dans ce contexte que les régulateurs mondiaux ont adopté les premiers accords de la réforme de Bâle 3 en 2010, qui a été finalisée en 2017, puis mise en oeuvre progressivement à partir de 2022. Ce paquet de mesures prudentielles a confirmé la possibilité pour les banques d’adopter deux approches pour calculer leur risque de crédit (en vigueur depuis 2006 et les Accords de Bâle 2) : les modèles standards des régulateurs ou des modèles internes développés par les banques (Internal Ratings-Based ou IRB) et soumis à la validation des régulateurs.

D’après les spécialistes, le recours aux modèles internes permettrait aux banques de calculer plus finement leur exposition aux risques de crédit, mais il pourrait également les amener à sous-estimer ces risques.

Dans ce contexte, l’utilisation du machine learning – qui s’est considérablement développée dans de nombreux secteurs ces dernières années – dans les modèles internes des banques suscite de nombreuses interrogations auprès des régulateurs et des acteurs financiers eux mêmes : sont-ils plus efficaces dans la différenciation des risques que les modèles statistiques usuels ? Quelles sont les données utilisées dans ces modèles internes recourant au machine learning ? Les algorithmes de ces modèles IRB sont-ils interprétables et explicables ? Sont-ils couramment utilisés par les banques ? Permettent-ils de réduire leurs exigences en capital réglementaire ? Quid des gains de productivité liés à ces modèles ?

Pour répondre à ces questions non exhaustives, ce nouveau numéro de la collection Opinions & Débats est à lire avec attention. Les auteurs, Christophe Hurlin (Université d’Orléans) et Christophe Pérignon (HEC Paris), analysent, sur les plans théorique et pratique, l’utilisation du machine learning dans les modèles internes des banques pour calculer leurs risques de crédit, qui déterminent ensuite leurs fonds propres réglementaires. Ainsi, cette étude synthétise la littérature académique sur le sujet et livre des recommandations pour les praticiens et les régulateurs.

Bonne lecture !

Jean-Michel Beacco, délégué général de l’Institut Louis Bachelier