Dans le cadre du Prix Turgot des meilleurs livres francophones d’économie financière, LouisBachelier.org publie quelques-unes des chroniques rédigées par le Club de présélection.

Ce billet est consacré à Mémoire de crises, de Ben S. Bernanke paru au Editions Seuil  (2015) 

Les mémoires de Ben Bernanke, Président de la Banque centrale américaine (Fed) entre 2006 et 2014, ne sont pas qu’un témoignage essentiel sur les crises des subprimes, les faillites bancaires, la crise grecque, les dysfonctionnements de la zone euro …, qui ont marqué le début du XXIe siècle. Elles constituent un véritable manuel d’économie monétaire et financière internationale. Elles livrent un diagnostic rigoureux des systèmes de régulation des réseaux bancaires et des marchés financiers mis en place par le Dodd-Frank Act et le référentiel de Bale III.

Rédigé (et traduit) dans un style vivant et didactique, l’ouvrage met en lumière la complexité – mais aussi la subjectivité – des nombreux paramètres qui influencent les décisions du Comité de la Fed. Ses gouverneurs (nommés par le Président des Etats Unis) doivent faire preuve à la fois de rationalité économique, de sens politique et d’intelligence émotionnelle. Ils doivent sans cesse trancher – en toute indépendance –  entre les avis parfois contradictoires des banques centrales étrangères, des agences fédérales et locales, des banques et des compagnies d’assurances, des lobbyistes de la grande industrie, des partis politiques… Ils doivent se heurter aux atermoiements législatifs, au maquis réglementaire et à l’inertie administrative qui caractérisent les institutions américaines. Ils doivent supporter que leurs messages (forward guidance) soient parfois déformés par les médias et mal interprétés par les marchés. Les recherches de l’auteur, en qualité de professeur des Universités de Stanford et de Princeton, l’ont élevé au rang des meilleurs spécialistes des «véhicules et des conduits » d’une politique monétaire. Mais il reconnait que « dans les sphères tant publiques que privées,  la manière de diriger est aussi importante que le degré de savoir ».

En conclusion, l’auteur propose un ensemble de mesures destinées à « fermer certaines sociétés financières présentant un risque systémique sans provoquer de panique bancaire ». Il avoue « qu’il reste  encore beaucoup à faire sur le front de la régulation », tout en « se déclarant résolument optimiste ».