Par Ivan Best, journaliste de l’Institut Louis Bachelier
 
L’Assemblée générale de l’Institut Louis Bachelier, qui s’est tenue le 28 mai, a été l’occasion de défricher les pistes de recherche à venir en matière d’économie financière.
 
Cinq ans de développement, une ouverture toujours plus grande sur l’extérieur, et de multiples perspectives de recherche économique et financière. Voilà comment on pourrait résumer, en quelques mots, la situation de l’Institut Louis Bachelier, telle qu’elle est apparue au cours de l’Assemblée générale de l’ILB, qui s’est tenue le 28 mai.
Cinq ans de développement qui aboutissent au financement d’une trentaine de chaires et initiatives de recherche, -et par là même de 234 chercheurs et 75 doctorats-  à près de 500 articles publiés dans des revues à comité de lecture… le tout avec le soutien, notamment, des partenaires historiques de l’ILB,  la direction générale du Trésor, la Caisse des Dépôts et Allianz.
L’institut ne s’arrêtera pas là en 2013. Ses locaux vont être agrandis, permettant l’accueil d’un plus grand nombre de chercheurs, avec l’objectif constant de favoriser les échanges. « Nous organisons désormais une conférence ou une rencontre tous les deux jours » souligne Jean-Michel Beacco, délégué général de l’ILB. L’échange et la valorisation-diffusion des travaux scientifiques: l’ILB publie le premier numéro d’une nouvelle série de documents, « Opinions & Débats », qui rend accessibles au grand public les résultats de travaux de recherche les plus récents. Les travaux les plus divers: « l’ILB est oecuménique » souligne son président, André Lévy-Lang, soucieux de favoriser les échanges entre les différentes « chapelles » d’économistes: « s’il existe une école mathématique française, c’est parce qu’après guerre des mathématiciens ont décidé de travailler ensemble » relève-t-il.
Et, s’agissant de la finance, les thèmes de recherche à venir sont nombreux qui permettront aux économistes de travailler ensemble, comme en témoigne les pistes exposées par plusieurs d’entre eux, appelés à être « visionnaires » à l’occasion de cette Assemblée Générale.
 
Une approche plus globale de la recherche en finance
« Il faut une approche plus globale pour la recherche en finance » souligne, à cet égard, Elyès Jouini, vice président de Paris Dauphine. « Il faut mieux prendre en compte les interactions entre individus, entre les individus et les règlementations ». Bref, favoriser une approche « plus holistique » , intégrant la question de « l’incohérence temporelle »: si l’on demande à un agent économique de comparer deux alternatives, à savoir le choix entre 10 euros immédiatement ou 15 euros dans une semaine ou celui entre 10 euros dans un an et 15 euros dans un an et une semaine, il les jugera totalement différentes, alors même que l’écart entre les deux options est strictement le même (une semaine).
Cette incohérence a un impact important sur les décisions individuelles, mais aussi sur les choix des autorités publiques, sur les décisions des entreprises, sur la gouvernance, affirme Elyès Jouini. Bref, un champ de recherche immense.
Tout aussi vaste est celui dessiné par Marie Brière (qui dirige la recherche d’Amundi présidente du conseil scientifique du Risk Forum), qui elle aussi, suggère de se pencher sur la question du temps en matière financière, s’interrogeant sur le décalage entre certains besoins de financement à très long terme et l’horizon des investisseurs, souvent plus court. La problématique des retraites est tout aussi fondamentale, et devrait faire l’objet de plus de recherches, estime Marie Brière. Quel que soit le système retenu -répartition ou capitalisation avec fonds de pension-, il se trouve sous tension, en raison de l’allongement de la durée de vie: « la question est celle de la répartition du risque entre générations » souligne l’économiste. 
 
Viellissemement, le maître mot
Jean Hervé Lorenzi (Paris Dauphine) insiste lui aussi sur ce thème du vieillissement des populations « maître mot » des évolutions économiques. « Il faut promouvoir la « silver economy », dit-il.  Il relie cette problématique à la question de l’épargne: il existait un « équilibre mondial ex ante, dans lequel l’épargne était supérieure à l’investissement, or cet équilibre est rompu » souligne-t-il. « La principale ressource rare, cela va être l’épargne ». Un bouleversement des équilibres financiers qui pourrait être bien sûr l’objet de nombreuses recherches.
Enfin, Jean-Michel Lasry (Paris Dauphine) évoque un vaste chantier, celui du rapprochement entre le monde de la finance et celui de la recherche. « Les professionnels de la finance ne parlent à personne, tandis que les chercheurs sont souvent marqués par leur détestation de l’argent » affirme-t-il. « L’ILB a un rôle extraordinaire, celui de rapprocher ces deux mondes. Il a créé un lieu pour cela, il a la crédibilité, ce serait là un bénéfice secondaire immense ».
Un bénéfice secondaire à comparer à celui offert par le Cern (Conseil européen pour la recherche nucléaire, à Genève), qui, au fil de ses recherches sur la physique nucléaire, a inventé le web, avec le système HTML, et en a fait don au monde entier…. 
 
chapo
L’Assemblée générale de l’Institut Louis Bachelier, qui s’est tenue le 28 mai, a été l’occasion de défricher les pistes de recherche à venir en matière d’économie financière.