La France se distingue par la mixité de son système d’assurance-maladie. Deux types d’opérateurs concourent à la couverture des mêmes soins : la Sécurité sociale et les organismes complémentaires. Une telle organisation entraîne des coûts de gestion élevés et favorise la hausse des prix des soins. La régulation actuelle des complémentaires encourage aussi la sélection des risques, ce qui produit des inégalités dans l’accès à l’assurance et aux soins. Aujourd’hui, les tickets modérateurs sont couverts par les assurances complémentaires et les exonérations sociales dont bénéficient les contrats collectifs encouragent des couvertures étendues qui alimentent la progression des dépassements d’honoraires, ce qui nuit à l’accès aux soins des individus moins bien couverts. En outre, le foisonnement des contrats d’assurance complémentaire rend l’offre difficilement lisible pour les individus, ce qui entrave les mécanismes concurrentiels. Enfin, les complémentaires n’ont pas les moyens de piloter l’offre de soins. On peut maîtriser en partie la dépense de soins en agissant du côté des patients pour les dépenses sur lesquelles ils ont une marge de décision. Mais l’essentiel des gains d’efficacité est à attendre de la mise en place des conditions d’une réelle contractualisation avec les offreurs de soins.

 
Ces conditions dépendent a minima d’une réforme à court terme de l’organisation de l’assurance-maladie en France, mais c’est une refonte du système qui en définirait véritablement les bases.

Du côté des patients, nous proposons de couvrir à 100 % les soins hospitaliers à l’exception d’un forfait journalier ramené à 8 euros, et de remplacer le ticket modérateur et les diverses participations financières en place pour les soins ambulatoires par une franchise et un co-paiement. L’ensemble ne doit pas être couvert par les assurances mais doit être plafonné. Il peut être modulé ou supprimé pour les personnes à bas revenu. Une réforme de court terme de l’assurance respecterait les périmètres d’intervention de la Sécurité sociale et des complémentaires. Il faudrait associer les complémentaires à la contractualisation avec les offreurs de soins et stimuler la concurrence dans ce secteur, par la définition d’un contrat homogène que tout organisme d’assurance complémentaire devrait offrir, et par la suppression des exonérations sociales favorisant les contrats collectifs.

Brigitte Dormont, Pierre-Yves Geoffard et Jean Tirole

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