Les fondements du protocole Bitcoin et de sa crypto-monnaie ont vu le jour en 2008 dans un livre blanc intitulé “Bitcoin : A Peer-to-Peer Electronic Cash System” envoyé à une liste de diffusion de cryptographie par un certain Satoshi Nakamoto. La première transaction bitcoin a été réalisée peu de temps après, en janvier 2009 sur la Blockchain, une base de données organisée sous forme de chaîne de blocs d’information, distribuée au sein d’un réseau pair-à-pair. Aujourd’hui, plus de sept ans après cette première transaction, la Blockchain est devenue un sujet très médiatique et de nombreux articles et publications traitent du Bitcoin et de son avatar générique, désormais communément appelé la technologie des registres distribués ou Distributed Ledger Technology (DLT).

Si l’on regarde les couvertures de presse consacrées au Bitcoin et à la Blockchain au cours des six derniers mois, nous pourrions être tentés de dire qu’il ne s’agit là que d’une simple mode passagère, manifestation de l’instinct grégaire des esprits animaux de Keynes, ou d’un fonctionnement mimétique à la Girard. Face à cette frénésie, certains économistes de renom ont même déclaré que le Bitcoin/la Blockchain constituaient “le parfait exemple d’une bulle” 2. Et pourtant, si l’on s’en tient aux faits, on constate que le Bitcoin et ses émules se sont montrés plutôt résilients et continuent à susciter l’intérêt et les investissements. Et sans nous risquer à prévoir l’avenir du Bitcoin et des autres crypto-monnaies, nous pensons que celui-ci s’annonce bien plus prometteur que certains ne voudraient le croire.

Il est aujourd’hui clair que les concepts qui constituent les fondements du Bitcoin et de son registre distribué sous-jacent, appelé la Blockchain, incitent de nombreuses institutions à porter un regard critique sur leurs systèmes d’information et leurs processus de gestion, voire à les repenser. Et le secteur financier en particulier, qui gère un volume important de paiements et de transactions multiformes, porte une attention soutenue à la question de savoir comment utiliser la DLT pour améliorer ou optimiser l’infrastructure des marchés financiers et des capitaux.

Dans ce rapport, nous tenterons de résumer les principales questions et enjeux concernant les registres distribués de données, et nous explorerons comment la DLT pourrait être intégrée à l’infrastructure des marchés financiers, notamment au niveau post-marché. Notre approche sera nécessairement non-exhaustive et pluridisciplinaire, avec une certaine dose d’anticipations prospectives. Nous ne prétendons pas, bien entendu, avoir fait le tour du sujet : il est bien trop vaste et complexe, et la vague de transformation qu’il a déclenchée trop rapide pour qu’un rapport se voulant général et synthétique comme celui-ci suffise. Mais notre travail de recherche nous a convaincus que la puissance perturbatrice du Bitcoin et de la Blockchain est bien réelle. Nous espérons que ce rapport constituera une synthèse utile pour les fournisseurs d’infrastructure de marché, et tous ceux qui réfléchissent actuellement aux risques et opportunités que pourrait représenter cette technologie pour leurs secteurs d’activité respectifs.

Alexis Collomb et Klara Sock